Eugene O'Neill
Dynamo | 2003
Texte français Françoise Morvan
Mise en scène Robert Cantarella
Assistante Isabelle Angotti
Dramaturgie Julien Fišera
Scénographie Claudine Brahem
Costumes Cécile Feilchenfeldt et Stéphane Laverne
Lumières Victor Dos Santos
Objets lumineux Christian Dubet
Conseil technique Christophe Bernard
Son Samuel Gutman
Avec Gilles David, Stéphanie Farison, Florence Giorgetti, Pierre-Félix Gravière, Johanna Korthals Altes, Emilien Tessier et Philippe Vieux (en alternance)
Notes de répétitions
Dynamo faisait partie d’un cycle d’expérimentations.
La double voix qui fait intervenir une voix intérieure et une voix extérieure, l’appel aux masques, un décor aux intérieurs apparents.
Cette pièce soulève aussi des questions de sens qui ont à voir avec les notions de territoire et de croyance, ce qui l’apparente à celle de Jean Magnan. De plus, elle appartient, comme Algérie 54-62, à un triptyque inachevé.
J’aime ce travail de résonances. Par exemple, dans le triptyque sur la guerre qui comprenait Le Siège de Numance de Cervantès, Le Sang chaud de la terre de Huysman et Les Guerriers de Minyana.
Pour le diptyque Magnan-O’Neill, il s’agirait plutôt des deux faces opposées du théâtre. L’œuvre de Magnan est faite de fragments, de morceaux, de collage, sa composition connaît la modernité et en tient compte ; elle ne se préoccupe pas d’une continuité de narration ou d’émotion, encore moins de progression dramatique. Pour O’Neill, c’est l’inverse : des formes dramatiques repérables allant du mélodrame au théâtre de caractères, des personnages stables.
Revoir les sculptures de Bertrand Lavier : éléments posés l’un sur l’autre dont on ne sait plus lequel est le socle de l’autre. O’Neill sur Magnan, c’est l’écart entre les deux qui travaille.
Un champ d’expérimentations.
O’Neill n’a laissé aucun mode d’emploi pour le traitement de la problématique des voix intérieures et extérieures. Aucune forme théâtrale n’y préexiste. Le cinéma nous y a habitués. Au théâtre, la fonction de la voix off rejoint habituellement celle du monologue ou de l’aparté. L’invention d’O’Neill exige une forme de séparation entre le texte et l’image, entre ce que je pense et ce que je dis. CF : James Coleman.
L’intérieur / l’extérieur, le fermé / l’ouvert, la croyance / l’athéisme, le ciel / l’enfer. L’espace est composé de deux maisons voisines, ce qui permet au spectateur de porter son attention alternativement sur l’une ou sur l’autre, en accomplissant son propre montage.
L’ensemble des didascalies forme le roman de la pièce. En même temps, ce qu’il décrit semble impossible à représenter. Je pense au mouvement de la caméra et non aux contraintes propres au théâtre. Il y a moins de mots donnés aux personnages que de mots donnés à l’auteur, plus de didascalies que de dialogues.
Le décor : il est extrêmement construit, deux maisons aux façades ouvertes, une pelouse, des peupliers sous le vent, des éclairs, un horizon avec des lilas, des chutes d’eau et, une dynamo dans le lointain. Tous ces éléments forment un ensemble dont la représentation semble improbable. Trouver l’énergie, la tension dans la description, refaire le chemin du plaisir de l’auteur à visualiser et le transformer en décision de scène. La construction doit être fragile et métallique. C’est la dentelle de ces indications maniaques et la solidité de son trait que nous devons transcrire aujourd’hui, sans nostalgie ou citation. Claudine Brahem, la scénographe du projet, est architecte.
Eugene O’Neill a la volonté de s’affranchir du théâtre de Broadway. Avec lui, on assiste à l’avènement d’un théâtre moderne qui puise ses racines dans une dramaturgie dite traditionnelle. La question autour de laquelle tourne son théâtre pourrait être celle-ci : comment se déroulent aujourd’hui nos tragédies avec nos outils, nos objets, nos paysages ? Le mélange fait d’archaïsme, ou plutôt d’un certain primitivisme – l’appel aux masques entre autres.
Avec cette pièce, Eugène O’Neill semble dresser un panorama des formes du théâtre. Il traverse l’Histoire des représentations depuis le mélodrame jusqu’aux prémices de ce que Samuel Beckett mettra en place plus tard. Ce théâtre demande aux interprètes un spectre de jeu particulièrement large.
Le burlesque. Certains personnages sont presque comiques tant ils vivent dans leur propre imaginaire.
Puisque Dieu n’existe pas, puisque le ciel est vide, remplaçons-le par cette divinité d’occasion, cette divinité de passage, qu’est l’électricité. Or c’est une femme, la divinité est représentée par une dynamo et cette dynamo est une matrice à l’intérieur de laquelle l’enfant veut retourner.
Une Amérique qu’il connaît parfaitement. Il évoque la question de l’âme, de l’idéologie américaine qui est au fondement même de la nation. Il analyse son absolue pudibonderie, sa soif de conquête du territoire, de conquête du ciel et de conquête de la science. Cf : Tocqueville (l’envie comme teneur du fonctionnement Américain)
Faire durer le jour pour l’éternité...
Quand les faits deviennent des légendes, il faut obéir à la légende.
Robert Cantarella - Dynamo - Répétitions
envoyé par www-colline-fr. - Futurs lauréats du Sundance.